Monday, October 25, 2010

Raison d’état & états d’âme


Joël Labruyère

Le magazine Point de Vue qui fait rêver avec les beaux mariages et les naissances princières, publie la version « officielle » de l’assassinat de Lady Diana. La grande presse n’en a pas pipé mot. Point de Vue a été choisi pour une révélation sans tapage. De toute façon les gens ne peuvent admettre une vérité si elle ne vient pas de la télévision. La stratégie du « dégazage » médiatique en douceur permet au Système de se confesser sans honte.
La faute est avouée d’une manière biaisée, le temps de déminer le terrain. Le scandale n’est plus alors qu’un pétard mouillé.
Pris du même élan, Paris-Match s’interroge sur un secret de polichinelle : « Johnson a-t-il tué Kennedy ? » La réponse est dans la question.
Quarante ans de suspense, c’est le temps qu’il faut à un journal français pour donner la réponse avec un point d’interrogation.

Au confessionnal, l’ordre hiérarchique est respecté. La mort des vedettes est moins bien dissimulée que celle des politiciens.
Le meurtre de Coluche n’a pas fait de vagues. Un saltimbanque français, qui s’en soucie ?
Le secret de Marilyn Monroe fut dissimulé le temps d’un deuil international, bien plus long.
Quelques jours avant la mort de l’actrice préférée de Kennedy, le crooner Franck Sinatra l’avait « préparée » dans son bunker californien. On a retrouvé Marilyn hagarde, errant nus pieds dans les rues de Los Angeles. Après son faux suicide, on a fait porter la casquette au frère de Kennedy, lui aussi éliminé. Récemment, ce fut le tour du fils de John Kennedy, qui « aurait perdu le contrôle de son appareil ». Ce sont des choses qui arrivent lorsque l’on descend d’une lignée irlandaise qui n’est pas majoritaire dans l’establishment protestant anglo-saxon.

Contrairement aux célébrités abattues au zénith de la gloire, la révélation de l’assassinat de Lady Diana est venue plus vite, six ans après le drame du 31 août 1997. Mais tout s’accélère de nos jours. C’est un ex-agent des services secrets britanniques qui a été chargé du dégazage de l’assassinat qu’il relate avec une précision toute policière. De l’intervention des agents de la DST (France) qui ont transformé la mercédes en corbillard princier, jusqu’au signal aveuglant envoyé dans les yeux du chauffeur au moment où il s’engageait sous le tunnel de l’Alma à la vitesse qu’on lui avait ordonné, tout est minutieusement raconté.
Il s’agit d’un rapport pour couvrir la famille royale face à une opinion anglaise échaudée.
A qui profite le crime ? On dit que Diana s’apprêtait à casser le morceau sur les mœurs royales ou à lancer un pavé contre Israël.
Maintenant que la faute est confessée, l’opinion publique pardonnera. Tout s’oublie.
(Diana, secrets and lies- Nicholas Davis)

Comme le Système ne fait pas les choses à moitié, dans le même temps où Point de Vue relate l’assassinat de Diana par les services franco-britanniques (MI 5 et DST), Paris-Match révèle les lettres d’amour que la princesse écrivait à un amant qui fait chanter la Couronne en menaçant de révéler les fantasmes de la déesse préférée des foules. Cet individu dit de lui-même qu’il est une ordure !
Une révélation à base de sexe doit compenser celle de mort. Cette ombre sur la mémoire de la sainte anglaise minimise l’annonce de son assassinat. Dans l’une de ses « lettres érotiques », elle demande à son militaire d’amant enrôlé dans la guerre du Golfe, des nouvelles de son « copain » (pénis) à qui elle souhaite bien du plaisir auprès des filles bronzées du Koweit. C’est écrit dans le journal…

Autre secret révélé par Paris-Match : les faux suicidés de l’Ordre du Temple Solaire ont été grillés au lance-flamme. Opération militaire.
Pour ceux qui ont suivi mes recherches dans le cadre de l’Omnium des Libertés, ce n’est pas un scoop, puisque j’ai révélé au début 1996 que ces gens avaient été exécutés par un commando militaire. C’était une intuition.
Les spirituels croient au karma et ne se suicident pas joyeusement en famille. Vous en connaissez beaucoup de bonnes mères de famille, croyantes, et d’un niveau culturel décent qui tuent leur enfant pour l’envoyer sur Sirius ? L’enquête a montré des traces de coups sur les corps carbonisés de ces femmes.
La question que je me suis posé à l’annonce de ce massacre en décembre 95, ce n’est pas de savoir si c’était un suicide, mais comment on peut gober un tel gag macabre ? Il faut être c…
Lorsque j’ai lancé l’idée que le « suicide collectif de secte » est toujours un crime des services secrets, je me sentais bien seul, comme sur d’autres sujets d’ailleurs…
Plus tard, des opportunistes ont repris cette idée pour faire du tapage. Le fils Vuarnet qui comprend vite si on lui explique longtemps, et dont la mère était au nombre des victimes, a demandé la réouverture de l’enquête bidonnée par le juge Fontaine (dont l’eau était croupie).
Lors d’une affaire de ce genre tout est fait pour diviser ceux qui savent quelque chose.

Vuarnet refusa de collaborer à la recherche de la vérité sur l’OTS car, lui avait-on dit, ce lascar de Labruyère est torpillé par les sectes.
« Torpillé par les sectes…taupe de la Scientologie… suppôt des gourous, etc… » C’est comique sachant qu’il est interdit à des Scientologues de se mêler d’affaires comme l’OTS car cela touche à des intérêts politiques. Je dirai peut-être pourquoi une autre fois.
Les antisectes et les RG dont j’ai ridiculisé les thèses ridicules m’ont alors diabolisé de manière vicieuse : « Il n’y a qu’à dire qu’il est scientologue et cela le discréditera ». Aussitôt dit, aussitôt fait. France-Soir lança le « turbin » monté par les RG contre l’emmerdeur.

Si vous voulez nuire à quelqu’un, dites qu’il est dans une secte. Et si vous voulez salir définitivement sa réputation, dites alors qu’il est scientologue. Face à cet épouvantail, les braves gens frémissent. On ferme les volets.
J’ai convoqué en justice Alain Vivien pour m’avoir accusé dans France-Soir d’être sponsorisé par la scientologie. Et la justice m’a arnaqué, il n’y a pas d’autre mot. J’ai versé une caution suite à l’instruction, mais ma plainte est tombée aux oubliettes. Ma victoire était trop facile. On préféra éviter le procès par crainte que le tribunal ne constate l’absence de sciento-virus dans mon organisme. Ceci dit les scientologues ne sont ni pestiférés ni des sous hommes, et je n’ai rien contre les personnes. Cette organisation est parfois lourdingue, et la présence américaine se fait trop sentir en coulisse, mais quoi, nul ne doit aller là où il n’a rien à faire. A chacun sa chapelle.

Un peu plus tard, la « justice » s’est souvenue de moi et j’ai été condamné pour diffamation de l’expert menteur, le psychiatre Jean-Marie Abgral. J’ai écrit dans un journal qu’il avait inventé le « suicide collectif » car il était chargé de la désinformation médiatique sur l’OTS et les sectes. J’ai donc été sanctionné pour avoir dit la vérité car peu de temps après Abgral fut mis en examen pour s’être improvisé expert sur l’OTS, sans mandat.

Je pourrais rire de l’accusation de « taupe de la Scientologie » si cela ne me fermait les portes de la communication dans un pays où il n’est déjà pas facile de s’exprimer librement.
Il faut savoir que les idées exposées dans Undercover sont « out tech » dans le jargon de l’orthodoxie scientologique (idées contraires au dogme). Qu’est-ce que cela signifie ? Pour ceux qui connaissent un peu la doctrine de Ron Hubbard, cela veut dire qu’un scientologue qui publierait des thèses négatives sur l’empire américain se ferait souffler dans les bronches. Lorsque je mets en cause les services secrets et les jésuites-maçons, et que je dénonce les loges occultes, c’est contraire au dogme des psychiatres suppressifs de la mythologie de Ron Hubbard. Un scientologue ne devrait pas me lire pour ne pas être « restimulé ».

Pour comprendre le tintamarre autour de la Scientologie, il faut rencontrer des adeptes sérieux et pas seulement des ennemis déclarés. C’est pourquoi je suis allé jusqu’à Hollywood pour causer avec les manitous de la secte à Tom Cruise et Travolta. Un bon souvenir de voyage au demeurant. J’ai trouvé Hollywood pas si mal. Cela m’a permis de découvrir aussi des scientologues du petit peuple de Los Angeles et même un rabbin scientologue. « The talmud is good but Scientoloy is very good ». C’est ça l’Amérique des sectes.

Quand je suis entré dans la spiritualité dans les années 60, j’ai voulu voir et toucher. J’ai lu Aurobindo et j’ai visité son ashram de Pondichéry en 69. J’ai pratiqué Zazen avec le maître Deshimaru en son dojo parisien au début 70. J’ai découvert Krishnamurti et je me suis rendu à ses conférences d’été à Saanen. Après la lecture du « Pèlerinage aux sources » de Lanza del Vasto, j’ai déboulé au Larzac pour voir Shantidas et sa Chanterelle qui m’accueillit ainsi : « Savez-vous ce que nous faisons ici ? » « heu…oui ». « Bon, entrez ». C’était un autre temps.
Quand je lis un livre intéressant, j’aime voir ce qu’il y a derrière. Et vous ? C’est pourquoi, selon les RG - Généreux Renseignements - je suis le meilleur connaisseur en sectologie.
Mais ce n’est pas un compliment car de là provient une réputation de suppôt des gourous. Un procès injuste, vu mes positions iconoclastes. Quant à la suspicion d’être « proche de la Scientologie », c’est une bonne blague, sachant que même les universitaires qui étudient cette organisation sont traités « d’agents de la Scientologie ». Leur faute ? Ils produisent des études neutres. C’est mal vu d’être objectif quand on parle des sectes.
Pourtant, plus un groupe est controversé, et plus il est excitant d’aller voir le diable de près. Or, qui se soucie de connaître quelque chose de première main en France ? On recopie.
C’est plus simple de ressasser les rumeurs – les rumeurs de « source sûre », bien entendu.
Lors de mes recherches, j’ai visité une centaine de groupes. Des sectes qui selon les médias « violent, pillent et torturent ». Quelle folie.
Maintenant que la passion est retombée, on y voit un peu plus clair. Je vais donc faire mon ultime déposition pour solde de tout compte

Louis Pauwels écrivait en 1985 dans le Figaro magazine : « On nous prépare des scandales de sectes. Je le vois, je le sens. » Parole prophétique d’un connaisseur des mouvements spirituels qui lança Planète et « Question de ».
Après le massacre de l’OTS, Pauwels qui avait flairé l’embrouille m’a encouragé dans mon action de clarification. Dès qu’il est monté au créneau médiatique, l’ADFI l’a attaqué pour son article du Figaro « L’esprit d’inquisition » pour lequel il m’avait demandé de collaborer. Le mot inquisition était lâché. L’ADFI bondit.
Pour Louis Pauwels, la campagne antisecte était le prélude à des lois pour imposer la pensée conforme. Pauwels accusait l’ADFI de promouvoir la normalisation mentale et d’être une inquisition. J’étais en phase d’où mon livre L’Etat inquisiteur * qui est paru après le décès de Louis Pauwels, mort au début 97, malade et affecté par les attaques de Janine Tavernier.

Les faux suicides de sectes, c’est quoi ? Depuis Guyana (900 morts) jusqu’à L’OTS, en passant par Waco (80 morts), ces massacres ont été perpétués par des commandos dirigés respectivement par la CIA, la DST et le FBI.
Il existe des rapports factuels de chercheurs indépendants. Le suicide collectif n’a jamais existé. Alors, pourquoi ces massacres ?
Je ne parlerai pas des drames de Guyana et Waco qui obéissent à une logique américaine, mais je peux dire ce que je sais sur l’OTS et le délire antisecte artificiel qui en a résulté.
Sans ce massacre médiatisé à outrance, la lutte antisecte n’avait pas de fondement. Il fallait du sang pour émouvoir les chaumières et pousser la classe politique à légiférer contre les groupes marginaux. C’est chose faite depuis la loi About-Picard qui est une loi militaire visant tout groupe ou individu que la République jugerait « sectaire », autrement dit dissident. Cette loi était le but de toute cette campagne. C’est une épée sur la tête des récalcitrants à l’ordre mondial qui voudraient s’organiser ou se réfugier quelque part pour vivre en groupe.
Et pourquoi une loi d’exception ? Parce que c’est une stratégie de la « grande muette » (l’armée). Elle, vous ne l’entendez jamais mais elle vous connaît. Elle dissimule le pouvoir réel, le lobby militaro industriel et ses banques.

Et l’OTS ? Sans nul doute, Jouret et Di mambro, les chefs visibles de l’Ordre du Temple Solaire trempaient dans le blanchiment d’argent de la mafia de l’armement. Les ordres templiers servent à couvrir ce genre de trafic. Ont-ils tapé dans la caisse jusqu’à ce que les services secrets décident d’éliminer les témoins ? On ne voit pas d’autre motif.
Les services secrets ont fait d’une pierre deux coups en organisant une commission d’enquête parlementaire sur les sectes dont le rapport est sorti en même temps que le massacre de l’OTS. Sans le sang et le feu de l’OTS, le rapport sur les sectes serait passé aux oubliettes. 172 associations aussi néfastes que les ligues de pêcheurs à la ligne, se sont retrouvées listées « sectes dangereuses ». Et comble de bêtise, l’OTS n’était même pas sur la liste noire de ce rapport bidon des RG !

Et les sectes ? Parlons de Janine Tavernier, « la mamie en lutte contre les gourous qui menacent nos enfants ». Une mère courage ?
Voici le pot aux roses : Janine Tavernier était un agent des services spéciaux. Une sacrée.
Son mari, Michel Tavernier, ex-militaire, trempait dans le trafic d’armes en Afrique. Les africains le nommaient « la dame noire » car « la mort vient dans son sillage ».
Janine et Michel s’étaient connus lors d’une mission chez Emmaüs dans le but de faire tomber l’abbé Pierre, cette grande gueule qui dérangeait les politiques et les éminences.
Leur mission accomplie, ils convolèrent en justes noces. La bassesse tisse des liens.
Plus tard, la Dame Noire alias Michel Tavernier infiltra le groupe survivaliste Ecoovie qui était dans le collimateur de l’état pour ses activités humanitaires suspectes.
D’où la mise en scène de la secte Ecoovie. L’intrépide Janine qui s’envole vers le Nord pour ramener son mari qu’elle sauve du froid et de la malnutrition en l’arrachant aux griffes de la secte retirée au fond des forêts sauvages.
En traitant tout ce qui bouge de gourou, Janine Tavernier a poussé des gens au suicide, tel le Dr Yves Julien, à la mort duquel, elle fut mise à la retraite. Une bavure de trop révélée par Labruyère puis reprise par la télévision. Fatal.
Je ne m’étonne donc pas que la présidente de l’ADFI ne répondait rien lorsqu’on lui demandait les sources de ses élucubrations.
La Grande Muette ne discute pas.
Dans une réunion secrète de l’ADFI, l’agent Janine Tavernier lança : « C’est la guerre ! »
J’ai pressenti que la Tavernier était un agent car elle manipulait trop bien les médias pour une mère de famille. C’était une tueuse.

Conclusion. Les ordres templiers et certaines organisations initiatiques appartiennent aux services secrets internationaux et au Vatican. Et ça cartonne entre les gangs pour le partage de la « fraîche ». Parfois, ça éclabousse au dehors et on enfume l’opinion avec les sectes.


* L’ETAT INQUISITEUR
Joël Labruyère - éditions des 3 Monts – DG Diffusion


Quatrième de couverture

Depuis la diffusion du rapport parlementaire sur les " sectes ", il n'est plus tout à fait permis d'appartenir à une organisation spirituelle structurée. La République laïque a mis une limite à l'exercice de la liberté de pensée, de culte et de réunion. Les esprits attentifs auront remarqué qu'une telle orientation est unique dans l'histoire de la République, car en s'attaquant à la liberté d'association, c'est la liberté individuelle qu'on restreint dans les faits. L'Etat inquisiteur est le résultat d'une enquête de trois années qui a conduit le président de l'Omnium des Libertés à rencontrer de nombreux membres et responsables de minorités spirituelles. L'auteur explore les coulisses de ce qui est devenu une véritable " chasse aux sectes " et offre ici un ouvrage à contre-courant du flot médiatique et éditorial actuel. Sans faire l'apologie des sectes, même si l'accusation ne manquera pas, il est nécessaire de traiter des questions de spiritualité que masque ce feu d'artillerie. A quoi correspond la floraison de groupes spirituels et qu'est-ce qui les anime ? Pourquoi sont-ils ainsi diabolisés ? Qui tire les ficelles de cette désinformation et pour quelles raisons ? Comment les politiques et les médias ont-ils été embarqués dans cette campagne ? Les auteurs répondent à ces questions en analysant les différents rouages d'une mécanique à marginaliser les hérétiques. L'Etat inquisiteur représente une contribution importante pour la défense des libertés fondamentales. Au-delà des aspects polémiques liés à une véritable affaire d'état, il s'agit d'un outil constructif permettant de mieux appréhender la situation française. Vous y trouverez des références, des faits et des arguments qui n'ont jamais été exposés à ce jour, et qui serviront pour la défense de quiconque pourrait être inquiété à cause de son appartenance ou de ses idées. Ce livre est aussi un témoignage devant l'histoire.

Thursday, July 22, 2010

Après le dalaï-lama, le karmapa sera-t-il le chef spirituel des Tibétains ?


La fête d'anniversaire du dalaï-lama, qui vient de souffler ses 75 bougies, a livré quelques clés concernant la succession mystère du chef spirituel et politique des Tibétains : assis à côté du prix Nobel de la paix, se tenait un lama de 26 ans à l'avenir prometteur.

Orgyen Trinley Dordje revendique le titre de 17e karmapa, l'un des plus importants chefs du bouddhisme tibétain. Séparés par deux générations, le dalaï-lama et le karmapa partagent un lien particulier: ils ont tous deux fui leur pays pour vivre un exil incertain. Le karmapa, qui s'enfuit en 1999, a aujourd'hui le même âge que le dalaï-lama quand celui-ci quitta le Tibet à la suite d'un soulèvement anti-chinois. Tous deux vivent à Dharamsala, dans le nord de l'Inde, une ville qui sert de base au gouvernement tibétain en exil, dont le dalaï-lama est le chef.

"Il est comme une figure paternelle pour moi. Je le considère comme mon professeur et mon guide", confie-t-il dans un entretien à l'AFP. Selon lui, la mort du dalaï-lama, de son vrai nom Tenzin Gyatso, aura un "impact énorme" sur le mouvement tibétain et la lutte pour une véritable autonomie au sein de l'administration chinoise. Il n'y a cependant pas "de précipitation" pour penser à la succession, jure-t-il, avant d'ajouter qu'il "ferait de son mieux pour aider aux activités que le dalaï-lama a portées" pour le Tibet et les Tibétains.

Le karmapa est l'un des chefs spirituels bouddhistes les plus importants au Tibet, avec le dalaï-lama et le panchen-lama. Mais le dernier panchen-lama, un enfant de six ans nommé par le dalaï-lama en mai 1995, a été porté disparu peu après et Pékin a nommé son propre candidat. Même s'il ne pourra jamais devenir le 15e dalaï-lama car il appartient à une autre branche du bouddhisme, le karmapa pourrait avoir une position dominante jusqu'à ce qu'une nouvelle figure soit trouvée.

Ce karmapa a été à la fois reconnu par le dalaï-lama et intronisé par le pouvoir chinois, avant sa fuite du pays, ce qui fait de lui une figure très influente. Il est de ce fait considéré comme un possible médiateur entre Pékin et les 200.000 membres de la communauté tibétaine en exil, même si selon lui, il reste considéré avec méfiance par la Chine.

Sa fuite du Tibet, à l'âge de 14 ans, avait été motivée par la crainte de se voir réduit à un rôle de marionnette par les autorités chinoises. "L'une de mes inquiétudes était qu'à l'âge de 18 ans, j'obtienne un poste au sein du gouvernement (chinois) et qu'alors je doive aller contre sa Sainteté et la cause pour le Tibet", explique-t-il.
Vivant désormais sous la loi indienne, il est soumis à des restrictions de déplacement. Un voyage prévu en Europe cette année a ainsi échoué et son seul voyage en 11 ans à l'étranger fut aux Etats-Unis en 2008. L'existence en Inde d'un mouvement tibétain, qui milite ouvertement pour l'autonomie ou l'indépendance et dénonce des violations des droits de l'Homme au Tibet, tend les relations diplomatiques entre l'Inde et la Chine. Interrogé par l'AFP, le porte-parole du dalaï-lama, Tenzin Taklha, souligne que le karmapa est l'un des nombreux lamas à pouvoir endosser des responsabilités après la mort du dalaï-lama. "Il est certainement l'un des chefs spirituels les plus importants. Il est charismatique et un chef prometteur avec un nombre important de fidèles", a-t-il cependant souligné.

Traditionnellement, la recherche du dalaï-lama est menée par les lamas les plus haut placés dans la hiérarchie, mais le régime communiste chinois a récemment indiqué qu'il se réservait le droit d'avoir le dernier mot.


Wednesday, April 14, 2010

Au Tibet, magiciens faiseurs de temps


par le Dr André Migot

Pour de nombreux lecteurs, le seul nom de Tibet évoque des phénomènes mystérieux et surnaturels, une certaine littérature leur ayant présenté, de ce pays, un tableau romancé où l’on voit, à chaque détour du sentier, un ascète nu faisant fondre la neige autour de lui ou volant à travers l’espace.

Certes, des phénomènes supranormaux existent et j’ai pu en constater quelques-uns au cours des longs séjours que j’ai faits au Pays des Neiges. Mais ils sont rares. Les vrais thaumaturges ne se montrent pas et il faut vivre longtemps dans leur intimité pour connaître leurs pouvoirs.

Par contre, les pratiques magiques y sont très répandues.
Les images que ce texte accompagne se rapportent à l’une des plus curieuses : éloigner la grêle destructrice des récoltes ou au contraire faire tomber la pluie en cas de sécheresse. Dans les deux cas, le rôle du sorcier est d’agir sur les démons maîtres du temps et de les contraindre à lui obéir en pratiquant des rites spéciaux accompagnés de la récitation de formules appropriées. Pour comprendre l’importance de ces cérémonies magiques dans la religion tibétaine, il est nécessaire de dire quelques mots de ses origines.

Lamaïsme et magie

Cette religion, connue sous le nom de lamaïsme, représente une forme très spéciale du Bouddhisme, n’existant qu’en Mongolie et au Tibet. Lorsque le Bouddhisme pénétra dans ce pays au 7ème siècle de notre ère, il s’était déjà beaucoup éloigné de la doctrine primitive et avait constitué une nouvelle forme dite « tantrique » fortement imprégnée de magie. Au Tibet, il rencontre une religion autochtone très puissante : le Bön, culte de divinités naturelles, bonnes ou mauvaises, qu’il convenait de remercier ou d’apaiser par des sacrifices et des rites magiques. C’est de la fusion du Bouddhisme tantrique et du Bön, qu’est né le Lamaïsme ; et cela explique qu’il ait conservé jusqu’à nos jours, un aspect rituel et magique très prononcé.

La religion bön a survécu, mais elle s’est si bien assimilée au Lamaïsme qu’un monastère bön actuel ne diffère d’une lamaserie que par des détails peu importants, comme j’ai pu m’en rendre compte en visitant celui de Denchin-gompa dans l’Est tibétain.

Mais en dehors de ces monastères, il existe des religieux bön-po qui continuent à pratiquer la magie primitive. Ce sont des isolés, vivant dans des ermitages ou errant de village en village, vendant des charmes et des amulettes, prédisant l’avenir et pratiquant des rites magiques pour le compte des paysans. Ils sont généralement spécialisés et c’est parmi eux que se trouvent les « faiseurs de temps ».

Les bön-po n’ont pas d’ailleurs le privilège de ces pratiques magiques et de nombreux religieux appartenant au clergé lamaïque sont généralement spécialisés dans ce domaine. Chaque monastère, même dans la secte réformée des « bonnets jaunes », compte parmi ses membres quelques sorciers que l’on consulte en de nombreuses circonstances. Il existe même dans les grandes universités lamaïques de Lhassa des collèges spécialisés dans l’enseignement de la magie. Les religieux qui ont obtenu le diplôme de docteur de ces universités sont en général attachés aux grands monastères de la capitale. Ce sont les « maîtres de conjuration », intellectuels de la magie, tandis que les sorciers ordinaires sont des empiriques, généralement ignares, ayant reçu d’un maître l’enseignement traditionnel « de la bouche à l’oreille ».

Dzogchen-gompa

Certaines sectes ont une notoriété spéciale dans ce domaine, en particulier celle du « Grand Accomplissement ». En mai 1947, lors de mon premier voyage au Tibet, j’ai eu l’occasion de faire un séjour prolongé dans l’une de ses plus importante lamaserie : Dzogchen-gompa, située dans l’Est tibétain et d’y assister à certaines pratiques magiques.

Ce monastère est bâti dans un site admirable et je n’ai jamais vu, dans aucun pays du monde, de lieu plus manifestement prédestiné à la vie contemplative. Tapi dans un vallon élevé, oasis de verdure semblant suspendu dans le ciel, il fait face à un grand cirque boisé qui se perd dans les contreforts d’un puissant massif glaciaire qui domine le vallon de sa masse étincelante. C’est dans cette forêt escarpée que se trouvent les ermitages des lamas contemplatifs et des magiciens ; et j’ai pu y passer quelques jours dans une hutte contiguë à la maisonnette de l’un de ceux-ci. Bien qu’appartenant à la secte des lamas voisins, il menait une existence très indépendante, n’ayant guère de relations avec la lamaserie et se déplaçant au gré de ses occupations. Très peu communicatif, il me fut difficile de l’apprivoiser, mais sa qualité de confrère-médecin, et le don de quelques comprimés d’aspirine, me permirent cependant d’entrer dans ses bonnes grâces, ce qui est fort appréciable lorsqu’il s’agit d’un thaumaturge doué de pouvoirs redoutables !

Le Costume des lamas sorciers

Le costume habituel des sorciers est semblable à celui des lamas de la « secte rouge », mais au lieu d’avoir le crâne rasé, ils laissent pousser leur cheveux longs, les allongeant encore par des fils de laine nattés, l’ensemble noué en un chignon volumineux, véritable turban surplombant la tête. Pour les cérémonies importantes, ils passent, par dessus la robe de laine, une sorte de veste de soie et une étole également en soie. Le tissu en est parfois fort beau, mais le luxe de ce vêtement dépend évidemment des moyens financiers de l’officiant, et les magiciens errants ne possèdent souvent qu’une pauvre veste de soie sale, usée et rapiécée.

La pièce essentielle du costume est un chapeau spécial réservé aux cérémonies magiques. Il se compose d’une couronne de six pétales fixés autour d’un bonnet et formant une sorte de diadème. Chacun de ces pétales est fait d’une plaque de carton ou de métal doré, au centre de laquelle est peinte ou ciselée l’une des six syllabes de la fameuse invocation : « Om ma-ni pa-mé hum ! » véritable leitmotiv de la prière tibétaine.

Les instruments

Certains des instruments utilisés pour les cérémonies magiques appartiennent à l’arsenal habituel du culte lamaïque : le « dordjé », petit sceptre de cuivre symbolisant la flèche d’Indra exterminant les démons, la clochette, le « damarou », petit tambour (souvent fait de deux calottes crâniennes accolées et tendues de peau), les vases d’offrandes. Mais quelques autres sont spéciaux aux rites magiques : la dague de bois ou de métal dont la courte lame triangulaire est munie d’ailerons latéraux, tandis que la poignée est terminée par une tête de cheval représentant le démon tutélaire : Tamdin. Ce poignard est l’arme essentielle de la lutte contre les démons. Le miroir de métal enfin, est surtout utilisé pour la divination.

Les cérémonies magiques doivent se dérouler selon des règles très précises, indiquées dans des livres spéciaux ou tantra, que les officiants suivent scrupuleusement car la moindre erreur matérielle ferait perdre toute efficacité à l’opération. j’ai souvent assisté à la confection de mandala ou cercle magiques : un lama lit lentement le texte du tantra correspondant, tandis que ses collègues tracent avec un soin religieux le dessin compliqué, disposant minutieusement les fils et les poudre colorées, reprenant le texte, vérifiant si leur travail est bien conforme au rituel. Celui des « faiseurs de temps » est surtout fondé sur les tables astrologiques très utilisées au Tibet dans de nombreuses circonstances.

Comment chasser les orages

Les rites des « faiseurs de temps sont très archaïques et ils se sont vraisemblablement conservés sans grand changement depuis l’époque des sorciers pré-bouddhiques. Le but de la cérémonie est d’assurer la protection de la maigre moisson d’orge des paysans contre les orages et les chutes de grêle. Pour y parvenir, le sorcier utilise sa puissance magique dans une lutte sévère contre les forces naturelles, non pour les détruire, mais pour les détourner de leur cours. Il ne s’agit pas en effet de détruire un orage qui s’approche ou de l’empêcher de se résoudre en grêle, mais de le détourner vers une région autre que celle où opère le sorcier.

Les opérations préliminaires sont effectuées au printemps. Une procession des habitants du village conduite par le « faiseur de temps » se dirige vers un des sommets dominant la région. Chacun des participants porte un vestige animal : crâne de cheval, de mouton ou de chien, peau ou squelette de renard, de corbeau, de serpent ou de toute autre bête, préalablement rempli de bandelettes de papier inscrites de formules magiques, le tout entouré de fils de laine de cinq couleurs différentes. Un trou est creusé sur ce sommet, un feu y est allumé et chacun y jette ce qu’il avait apporté, tandis que le vent des hauts plateaux attise la flamme jusqu’à combustion complète. Des pierres sont alors amassées sur l’emplacement du bûcher pour former un petit cairn, à l’intérieur duquel on enferme parfois quelques flèches, un fer de lance ainsi qu’une image de l’oiseau mythique Garuda, monture de Vishnou et protecteur de la secte Bön.

Sur le cairn sont alors construits un certain nombre de petits édifices fragiles désignés sous le nom de « croix de fils », ils sont constitués par des baguettes entrecroisées autour desquelles on enroule des fils de laine de diverses couleurs. A la fin de la cérémonie, des rameaux de bouleaux agrémentés d’une plume blanche sont distribués aux assistants à la manière de nos rameaux bénits ; ils seront ultérieurement plantés dans les champs où ils joueront le rôle d’emblèmes protecteurs.

En dépit de la protection apportée par les « croix de fils », le rôle du « faiseur de temps » n’est pas terminé pour autant et c’est pendant l’été, saison des orages et de la grêle, qu’il devient capital, exigeant de lui un savoir, une vigilance et une décision de tous les instants. Il s’installe pour toute la saison dans une hutte spécialement édifiée à son intention par les villageois, sur un sommet d’où l’on jouit d’une vue très dégagée sur toute la région. Il peut ainsi surveiller le ciel et voir approcher les gros nuages annonciateurs de l’orage ou de la grêle, ce qui lui permet, s’il est suffisamment vigilant et compétent, d’agir à temps pour les arrêter.

Un bon « faiseur de temps » est capable de se rendre compte très rapidement du danger et de la menace de grêle qu’apporte le nuage qui approche, et il possède pour cela un certain nombre de moyens. L’un d’eux consiste à examiner l’image d’un nuage réfléchie sur une couche d’eau, au fond d’un large récipient plat fait d’un alliage spécial de cinq métaux précieux. Certains caractères de cette images lui indiquent si le nuage examiné apporte ou non la grêle, s’il risque d’éclater sur le village, mais il est impossible de connaître ces caractères qui sont le secret jalousement gardé du « faiseur de temps ». D’autres indications lui sont données par la sonorité de son damarou, ce petit tambour double dont nous avons parlé. Si elle est élevée « joyeuse » selon l’expression tibétaine, aucun danger ne menace le village ; si elle est au contraire assourdie, « menaçante », le danger de grêle est imminent et grave et il faut agir au plus vite pour le conjurer.

Le « faiseur de temps » se retire alors rapidement dans sa hutte. Brandissant son poignard magique, il récite des mantras destinés à influencer les divinités protectrice de la sectes à laquelle il appartient, à les « contraindre » à se faire ses auxiliaires dans la lutte contre les démons de l’orage. Nous avons vu que le « faiseur de temps » n’a pas la prétention de supprimer les nuages de grêle ou de les empêcher d’éclater sur le village dont il a la garde, son but est tout simplement de les détourner de leur cours naturel pour les orienter vers une autre région.

Si les paysans de la dite région ont également à leur service un « faiseur de temps » qualifié, vigilant et puissant, celui-ci renverra à son tour les nuages dans une autre direction. Cette lutte entre les pouvoirs des magiciens et les forces de la nature continuera jusqu’à ce que les nuages d’orage arrivent à proximité d’un village non protégé ou n’ayant à son service qu’un « faiseur de temps » incapable ou négligent ; n’étant arrêté par rien , ils fondront alors sur le village avec une force redoublée au grand détriment de la récolte qui risque d’être anéantie. Le malheureux magicien incapable ou négligent perdra évidemment toute la rémunération de son travail qui est toujours payé après la récolte, et seulement si elle est bonne. Il perdra également sa réputation et ses futurs engagements et sans parler de la sévère correction qu’il risque de recevoir des mains des paysans, furieux d’avoir été trompés et d’avoir perdu leur récolte par la faute de cet ignorant.

Heurs et malheurs des « faiseurs de temps »

Nous avons vu que la magie était utilisée dans toutes les sectes lamaïques, même dans la secte réformée des « bonnets jaunes » qui constitue l’Eglise officielle du Tibet, et à laquelle appartiennent le Dalaï-lama et le Panchen-lama. Nous avons également vu qu’il existe des collèges de magie dans les grandes universités lamaïques de Lhassa, et le gouvernement tibétain utilise les services réguliers de trois « faiseurs de temps », docteur ès-sciences magiques diplômés de ces universités.

Leur tâche essentielle consiste à empêcher la grêle de tomber dans le parc de Norbulingka, résidence d’été du Dalaï-lama dans la banlieue de Lhassa, ainsi que sur les fameux toits d’or du Potala, le palais-forteresse-monastère qui domine de sa masse puissante la capitale tibétaine et qui est le siège officiel du Dalaï-lama et du gouvernement tibétain. Une telle atteinte de la citadelle religieuse du Tibet serait en effet considérée par les Tibétains comme un présage funeste.

Ces trois « faiseurs de temps » officiels opèrent à tour de rôle. A titre de bénéfice, ils reçoivent du gouvernement la concession de terres de bon rapport et sont par ailleurs, autorisés à utiliser leur science pour le compte de particuliers, ce qui leur assure de substantiels revenus.

Mais leur haute situation est fragile, car un échec se traduisant par une chute de grêle sur l’un des deux emplacements privilégiés risque de leur attirer de très graves ennuis, et un certains nombre d’anecdotes circulent dans le peuple sur les heurs et les malheurs de ces grands personnages. On cite de belles réussites comme en ce jour fameux où la grêle cribla littéralement la campagne alentour du parc de Norbulingka sans qu’un seul grêlon atteignît l’intérieur du cercle magique tracé par le sorcier autour du domaine sacré. Par contre, un autre jour, la grêle ayant littéralement ravagé le parc du Dalaï-lama, le Régent, furieux, envoya chercher le « faiseur de temps » responsable, dans l’intention de le châtier sévèrement. Mais celui-ci déclara qu’il n’était en rien coupable, n’ayant pas le pouvoir de s’opposer à la volonté des dieux. Ceux-ci avaient, en effet, voulu prévenir par ce signe le Dalaï-lama qu’un danger imminent menaçait le peuple tibétain. Et pour prouver que sa compétence magique n’était pas en cause, il versa, sous les yeux du Régent, de l’eau dans un tamis sans qu’aucune goutte ne le traverse. Peu après cet incident, une grave épidémie de variole fit en effet de nombreuses victimes jusque dans l’entourage immédiat du Dalaï-lama.

Comment faire tomber la pluie ?

Le rôle des « faiseurs de temps » n’est pas uniquement d’éloigner la grêle, mais aussi de faire tomber la pluie en cas de sécheresse persistante. Ce cérémonial se rattache à un très vieux culte pré-bouddhique et même pré-aryen appartenant au fond le plus archaïque des religions indiennes : le culte des dieux-serpents habitant les sources et les rivières et considérés comme les divinités des eaux a persisté jusqu’à nos jours au Tibet, et le rituel actuellement utilisé par les « faiseurs de temps » est attribué à Tsong-kha-pa, le grand réformateur de la secte des bonnets jaunes.

Lorsque la sécheresse persistante devient inquiétante pour les cultures, on commence par organiser une procession des femmes du village, chacune portant sur son dos un des énormes livres sacrés de la lamaserie voisine ; en longue file elles tournent ainsi autour du village et des champs qui en dépendent. Si cette procession ne donne pas de résultats, on convoque le « faiseur de temps » qui procède alors à la cérémonie selon un rituel très compliqué.

L’officiant lave d’abord soigneusement le lieu où se déroulera la cérémonie, puis il y dépose une image de Tsong-kha-pa, des fleurs non vénéneuses, un gâteau blanc et un vase précieux dans lequel il place des pilules magiques, des fleurs et des épices tout en répétant cent huit fois le mantra de Tsong-kha-pa. Après avoir recouvert le vase d’un tissu rouge, il adresse aux dieux-serpents le petit discours suivant : « O ! vous, tous, nagas grands et petits, je viens vers vous non pour vous nuire mais pour vous demander de faire tomber la pluie, pour le grand bien des êtres et particulièrement des habitants de ce village. Vous savez que c’est Tsong-kha-pa qui vous a ordonné de m’obéir et si vous ne le faites pas, je vous briserai la tête par la puissance de mes mantras. Ecoutez-moi donc, et ne quittez pas ce lieu avant que la pluie ne tombe. » Après quoi, le lama continue la récitation de ses mantras tout en déposant des offrandes de nourriture, de pierre et de matériaux précieux devant les sources, les lacs et les rivières du voisinage, de façon à apaiser les divinités que les gens du village auraient pu mécontenter.

Finalement, un édifice magique très compliqué est construit dans un champ proche du village. Ce « palais de fils » ressemble un peu aux « croix de fils » dont nous avons déjà parlé, mais il est beaucoup plus élaboré et de taille beaucoup plus grande, pouvant atteindre jusqu’à quatre ou cinq mètres de hauteur. C’est un assemblage de baguettes et de fils de laine de couleurs diverses formant une élégante petite maison à claire-voie destinée à attirer et à abriter les esprits des eaux ; on espère, en effet, que cet aimable accueil les décidera à dispenser la pluie aux gens du village. La construction de ce palais de fils est longue et difficile, d’autant plus qu’elle doit obéir à des règles précises. Elle peut demander jusqu’à trente kilomètres de fils de laine, les doigts très habiles d’un spécialiste et plusieurs jours d’un travail patient et délicat.

Lorsque la sécheresse atteint toute une province, le gouvernement tibétain complète le travail des « faiseurs de temps » par des mesures officiels telles que l’interdiction des cérémonies pour empêcher la pluie. Cette défense pourrait apparaître sans objet, mais dans ce pays d’individualistes forcenés, il peut arriver que, en dépit de la sécheresse, quelques braves Tibétains fassent un sacrifice magique pour que la pluie ne vienne pas troubler la construction de leur maison, une fête de famille ou des danses lamaïques dans le monastère voisins !

Comme on le voit, les méthode utilisées au Tibet, pour lutter contre les dérèglements de la nature, sont pleines de poésie, d’imprévu et de fantaisie. Ont-elles plus ou moins d’effets que celles, d’apparence plus scientifique, que nous utilisons en Occident ? Il est bien difficile de le savoir avec certitude. Elles ont au moins l’avantage de passionner les Tibétains et de leur apporter un sentiment de sécurité métaphysique que nous sommes bien incapables d’éprouver, n’ayant pas la précieuse ressource de mettre sur le compte des dieux certains résultats qui pourraient paraître défavorables à des esprits superficiels, et que notre manque total de subtilité nous ferait naïvement considérer comme des échecs.

Monday, March 01, 2010

Shambala en guerre contre les La-los


Après que le dixième Détenteur des Castes Gya-tso nam-gyäl fut monté sur le trône (de Shambala), le « Me-ka Gya-tso » (Ma-kha rGya-mtso) apparut en l’an singe-bois du cycle Nyi-drol (625 après J.C.). A cette époque vivaient dans le pays appelé Me-k’a (Me-kha) les maîtres La-lo (Kla-klo) A-d’o (A-do), A-no-gha, P’ag-dän (Phag-ldan), J’i-pa wang-po (Byis-pa dbang-po), G’ö-kar-chän (Gos-dkar-can), Jom-j’e (’Joms-byed), Ma-dhu-ma-ti et leurs disciples. Le septième d’entre-eux, D’ar-dän (Dar-ldan), connu aussi sous le nom de Drang-tzii lo-dr’ö (sBrang-rtzi’i blo-gros), Madhumati (1) fonda une nouvelle religion et propagea les enseignements La-lo. Beaucoup de non-bouddhistes l’adoptèrent et ils détruisirent un grand nombre de monastère bouddhiques. Il est expliqué que la religion La-lo durera 1800 ans (2).

La plupart des partisans de la foi La-lo, à l’instar d’autres non bouddhistes, ne s’appuient ni sur la méditation ni sur les idées philosophiques, mais paraissent suivre sans discernement des modes de penser mondains et préconisent de nuire à autrui comme pratique de la religion. Dans le futur, de nombreuses nationalités de La-los – qui incluront les peuples Hou-zi (Ho’u-zi) et T’en-dr’uu (Then-gru’u) de Chine, les tribus des régions frontalières du Tibet et de l’Inde et les gens Lo-k’a-tr’a (Klo-kha-phra) – uniront leurs forces. Ensuite, en un lieu dénommé Tri-li se déroulera une grande guerre La-lo. Les La-los, alors unifiés, deviendront très puissants et domineront la moitié du monde (3).

Histoire de la guerre contre les La-los

Après l’année singe-feu du cycle Dong-ngäg le roi La-lo, qui est considéré comme une manifestation des anti-dieux, rassemblera ses forces à l’ouest de l’Inde dans un lieu nommé Tri-li. Il finira par gouverner la partie centrale de l’Inde au sud de la rivière Shri-ta, tout le Tibet et la moitié du monde. Tandis que, pareil à un éléphant fou, il régnera avec orgueil et sauvagerie, les ministres La-los auront le sentiment que personne au monde n’est plus puissant que ce roi, et feront à ce propos de nombreuses déclarations. Alors, par la force de prières antérieures et l’infaillible vérité de la loi de cause et effet, en conformité avec ses désirs propres, la déesse Re-ma-te deviendra l’épouse du roi La-lo. Elle dira à ses ministres : « O ministres fiers et puérils, j’ai été témoin d’un monde plus grand encore que celui-ci. Si nous ne le conquérons pas, votre habituel orgueil ne sera que fanfaronnade d’enfant. Par conséquent, puisque ce monde au-delà du nôtre existe, employez-vous dès maintenant à le vaincre. »

Alors, pleins d’arrogance et d’impatience, les ministres déclareront : « S’il existe un deuxième monde par-delà le nôtre, nous devons absolument le conquérir. » Remplis de courage, ils s’écrieront tous d’une voix forte : « Allons le conquérir ! » Les ministres feront surveiller les airs et, voyant les multiples signes de fortune et de bonheur du pays de Shambala au nord, les vagues de jalousie éclateront. Ainsi commeceront-ils à diriger leurs forces militaires sur Shambala.

Ce moment correspondra à la 97ème année du règne du vingt-cinquième Détenteur royal des Castes (4), l’an mouton-eau du vingt-troisième cycle Nyi-ma (2425 après J.C.). Alors, en vue d’aider les La-los, grâce à la force du karma, le souverain religieux produira diverses sortes d’armes et des millions de forces militaires irrésistibles, comme dans un spectacle magique. De Shambala à Jambudvipa il conduira les forces réunies des douze grands dieux : 90 millions de chevaux volants, 400 000 éléphants, 500 000 voitures, une infanterie composée de toutes les personnes disponibles, des navires de l’espace se déplaçant plus vite que le son, des véhicules à moteur actionnés par le feu et la vapeur, des véhicules armés aux blindage de fer, des explosifs que l’on peut lancer à la main, et différents types d’armes atomiques. En Inde, sur les bords de la rivière Shrita, aura lieu alors une grande guerre contre les La-los.

Comment les La-los seront vaincus

A ce moment Dr’ang-tzii lo-dr’o, roi des La-los sera poignardé par Drag-po K’or-lo-chän. Et Wang-poi gön-po (dBang-po’i ngon-po) et le fils du général La-lo Dawa chen-po (Zla-ba chen-po), seront respectivement poignardés par la main de Hanuman, général du Détenteur des Castes, et par celle de Dr’ag-po K’or-lo-chän. Ainsi seront-ils défaits. Les forces anti-divines des La-los seront pareillement vaincues par celles des douze grands dieux ; alors tous les dieux sans exception se rangeront aux côtés du Détenteur des Castes.

Alors, en partant de l’Inde et dans le sens des aiguilles d’une montre, le pays entier de Jambudvipa sera gouverné par le Détenteur des Castes Dr’ag-po k’or-lo-chän. Les enseignements du Bouddha en général et ceux du Mahayana tel que le Kalachakra , en particulier, fleuriront immensément. La durée de la vie humaine augmentera progressivement jusqu’à 1 800 ans et l’Age Parfait renaîtra plus glorieux que jamais auparavant.

Garje Khamtrul Jamyang Döndrup
Source : « Le Tibet Journal », éditions Dharma.


Notes de Bouddhanar :

(1) Madhumati c’est le nom donné à Mahomet (570-635) ou Mohammed, (Muhammad en arabe).

(2) 625 + 1800 = 2425. D’autres exégètes du Kalachakra disent que c'est durant l’année 2424 après J.-C. qu'aura lieu le combat final, apocalyptique, entre les forces de Shambala et les La-los.

(3) L’idée de la domination musulmane annoncée par des commentateurs des prophéties du Kalachakra, comme le lama Garje Khamtrul, est à l’origine de l’islamophobie de beaucoup de bouddhistes occidentaux. Les services spéciaux de l’empire anglo-américain n’hésitent pas à exploiter cette islamophobie. N’oublions pas que depuis le 11 septembre 2001, l’empire est engagé dans une guerre mondiale pour le contrôle des ressources pétrolières des pays arabes. Cette nouvelle guerre mondiale passe inaperçue parce qu’elle use davantage de la propagande, du contrôle mental, des opérations noires de la CIA, des mercenaires de sociétés privées (Blackwater) que de la mobilisation de millions de fantassins.

(4) Le roi de Shambala.


Photo : Le lama Garje Khamtrul Jamyang Döndrup (né en 1927), tulkou du troisième Khamtrul, Gyurme Trinle Namgyal (1879-1926) et collaborateur de Rigpa

Sunday, January 31, 2010

Kalachakra, initiation ou contre-initiation de masse ?


Le texte sacré (tantra) du bouddhisme tibétain appelé « Tantra du Kalachakra » ainsi que le mythe de Shambhala faisant partie de celui-ci sont à l’origine d’une importante initiation ouverte à tous. « Kalachakra » (sanskrit) signifie la « roue du temps » et est aussi le nom du dieu du temps tibétain le plus puissant. Le « Tantra du Kalachakra est considéré comme étant le plus récent des textes révélés (10ème siècle) et est considéré par les lamas comme étant l’apogée de tous les systèmes bouddhistes.

Le rituel de l’initiation de Kalachakra dit :

« Mon enfant, approche-toi,
Je t’enseignerai, dans leur totalité,
Les rites et les pratiques du Grand véhicule.
Tu es le vaisseau de la Grande voie. »

Le candidat à l’initiation doit entrer comme un enfant dans le mandala de Kalachakra. Mais sait-il que l’initiation le rend réceptif à un égrégore (énergie psychique collective) qui le transformera en « soldat de Shambhala » afin de combattre, en tant que fantassin ou officier, dans de terribles batailles et écraser « les ennemis de la doctrine » ( Kalachakra I. 128-142) ?

Depuis plus de trente ans, des centaines de milliers de personnes ont reçu L'initiation de Kalachakra en croyant participer à la promotion de la paix et de la tolérance entre tous les hommes. Elles ne soupçonnent pas qu’elles sont en quelque sorte enrôlées dans une terrible guerre contre les musulmans. En effet, « Le Tantra du Kalachakra jure une guerre totale entre le monde islamique et le monde non-islamique lors de laquelle les disciples de Mohamed seront présentés comme les ennemis principaux des bouddhistes. Dans le texte original, la Mecque est décrite comme la résidence de « l’idole puissant et impitoyable des barbares », « l’incarnation du démon » (Shri Kalachakra I. 154). Ainsi d’après l’adversaire principal du prochain roi du Shambhala, Rudra Chakrin “tourneur courroucé de la roue”, nous apprenons qu’ils sont également nommés mleccha ce qui signifie “barbares” mais également “habitants de la Mecque”. Un autre commentaire du Kalachakra appelle Rudra Chakrin le “meurtrier des Mlecchas ». (Trimondi)

Les Mlecchas-musulmans sont désignés comme les ennemis des bouddhistes, de Shambhala et aussi des prétendues nations civilisées qui prétextent la guerre contre le terrorisme islamique pour imposer leur domination mondiale.

La promotion grand public du kalachakra participe-t-elle à l’hégémonisme anglo-saxon ? Les services que le Dalaï-lama rend à l’empire anglo-américain sont indiscutables et ont été reconnus le 17 octobre 2007 quand le « prince de l’église » tibétaine a reçu la médaille d’or du Congrès des mains de l’immonde George Bush.

« Normalement, l’initiation de Kalachakra n’est pas donnée en public ». (La « Lettre de la canine de mangouste », citée par les auteurs du livre "Une Grande Imposture". )
« Selon certaines sources, les initiations de kalachakra étaient principalement données autrefois par ceux qui détenaient le rôle de Panchèn Lama, et cela en raison d’un lien particulier, le Panchèn Lama étant une manifestation du dieu-roi de Shambhala. Peu à peu, le quatorzième Dalaï-lama s’est octroyé ce rôle, jusqu’à ce que finalement aujourd’hui, aucun autre lama n’ait la possibilité de donner l’initiation de Kalachakra en public. Pour le Dalaï-lama, accorder l’initiation de Kalachakra est la meilleure méthode pour faire de l’argent, pour contrôler les gens par le biais de la dévotion spirituelle et pour propager sa réputation. De cette manière, il peut utiliser la foi religieuse des gens pour accomplir ses objectifs politiques. »

Le livre « Une Grande Imposture », édité par la Western Shugden Society, s’inspire de sources bouddhistes tibétaines pour dénoncer la dérive de l’institution des Dalaï-lamas depuis le 17ème siècle.

Le livre « Une Grande Imposture » est publié par la Western Shugden Society (WSS) www.westernshugdensociety.org

Pour se procurer le livre :